
Pour les premières élections municipales en Tunisie après la révolution: très faible participation (n’a voté que près de 34% de la population – contre 68,4% aux élections de 2014), jeunes marginalisés, femmes en première ligne et listes civiques, sont les mots-clés à la suite du vote. Élections en silence.Même la presse a déserté son rôle ou parfois le silence est éloquent. Assourdissant.
Le manque de participation – prédiction confirmée – frappe mais ne surprend pas, surtout l’abstentionnisme des jeunes: un pays très jeune – l’âge moyen de près de trente ans – qui ne pense pas aux jeunes, comment dès lors demander leur vote? Les gens étaient résignés, découragés et désintéressés avant le vote, au moins pour une majorité. Surtout, les jeunes sont loin de la politique. Cependant, une minorité significative de la population est très active et n’a pas oublié l’héritage d’associations et d’engagements civils profondément ancrés en Tunisie.
- © Tawfiq Omrane - "Elettori votano - anche i candidati" - Electors vote, as well as candidates"
- © Tawfiq Omrane - "La campagna elettorale: prima e dopo" - "La campagne électorale: avant et après" - electoral campaign: before and after"
- © Tawfiq Omrane "quando un partito chiede aiuto a un'indipendente" - "Quand un parti demande de l'aide à un indépendant" - "when a party ask for help to an indipendent"
On se souviendra de ces élections comme celles de l’explosion des listes civiques indépendantes: des partis, du système. Ce sont des formations laïques, avec une forte présence féminine, très actives, liées à des programmes non pas à des idées selon la logique du faire plutôt que de dire et de promettre. L’urgence s’appelle le travail, l’origine de tous les maux sociaux, liée plus qu’à la mauvaise reprise économique du pays et la conjoncture, à la corruption et à la lourde machine tant au niveau politique qu’administratif. Le parti religieux Ennahdha (de Rached Gannouchi) sembla triompher au début. Mais, ce n’a pas été le cas, toutefois, le populisme dans les pays méditerranéens reste fort. Curieux que dans un climat de méfiance, il soit donné du crédit au parti qui, à la suite de la révolution de 2011, avait gagné l’élection en utilisant le cheval de bataille du travail. En recul, Nida Tounes, parti sortant du gouvernement (du Président de la République Béji Caïd Essebsi, qui avait remporté les législatives et le présidentielle en 2014) et très faible présence des partis historiques de la gauche

La présence féminine émerge certainement au premier plan, également en raison de la loi qui exige que 50% des candidats soient des femmes, et paradoxalement fortement soutenues par le parti religieux: ce pourrait être une femme, c’est Souad Abderrahim, 54 ans, pharmacien et ancien prisonnier politique, qui devienne maire de Tunis et ce serait une première. La question n’est pas celle du nombre mais celle de la candidature des femmes et d’une certaine utilisation des femmes comme image du renouveau de certains partis.

Les listes civiques sont la vraie nouveauté. Menant par exemple dans le quartier international, la banlieue nord de Tunis, la Marsa, la liste « Le changement Marsa » distancie grandement le parti religieux. Le chiffre qui, à mon avis, doit le plus inquiéter est la marginalisation des jeunes, dont la voix a été oubliée. Les femmes sont invitées à sortir de la logique de la confrontation et des quotas afin de promouvoir l’avenir du pays en mettant l’accent sur les ressources de demain.
Ilaria Guidantoni, 7 mai 2018
© Tawfiq Omrane – « Municipali… e dopo: « vi ho dato mio voto, e voi che cosa mi date? » – « Local election… and after: « I gave you my voice, and you what are you going to give me? »




